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ENFANCE

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L'homme n'est qu'une suite

de rencontres atomiques.

 

Chaque mort, chaque mort

s'enterre dans ma tête

des croix dans ma tête

Chaque mort est une pensée

sa dernière pensée dans ma tête

toutes leurs dernières pensées

c'est par ce chemin que la folie

fait pénitence.

Ils ont tous pensé la même chose

j'ai peur de comprendre.

Je fais pénitence.

Je plante des croix sur leurs pensées

Fleur de bois mort

pour apaiser mon cerveau

tous les jours c'est printemps.

Chaque mort, chaque mort

j'entends dans ma tête

Il y a un sourire sauvage

qui chahute mon visage

je ne suis qu'un mort

qu'un mort, je m'enterre dans ma tête

je m'entends dans ma tête

penser, la même pensée

j'ai peur de comprendre...

 

*

 

Oh joie.

 

Je connaissais une fillette,

affligée d'une bien curieuse maladie,

pour le moindre mensonge,

elle pissait littéralement le sang du nez.

Un jour elle est venue à moi,

et m'a dit qu'elle m'aimait.

Elle a tellement pissé du nez,

qu'elle en est morte.

 

*

 

Fait divers VI.

 

Le fou astucieusement,

à l'aide de sa mouillette,

s'évertue à ôter les fourmis noires,

qui surnagent dans son oeuf.

Un ange passe,

le temps de lui expliquer,

que séparer les fourmis d'un jaune d'oeuf,

c'est comme séparer la lune du soleil,

le fou ne dit mot,

regarde s'évanouir le chérubin,

et gobe l'oeuf.

 

*

 

Eclat de rire.

 

Ma mère est morte.

Mon père est mort.

Mes frères et soeurs sont morts.

mes enfants sont morts.

mon espoir est mort.

mon rire est mort.

 

*

 

Amour.

 

Pauvre petite elfe, perdue dans la jungle cruelle de la vie,

tu as tiré ta dernière flèche et ton carcan vide bat sous ta poitrine,

tu souffres dans la nature hostile,

ton amour-faim a disparu,

et c'est maintenant une soif de mort qui te hante.

Tu cours nue et apeurée dans les dédales,

sans voir ton destin.

Tu oublies tout, au fur et à mesure,

que tu t'enfonces dans le coeur.

Puis tu t'arrêtes, ton esprit n'est plus qu'un noeud de douleur,

et si ma main ne t'atteint pas bientôt, ton corps s'enracinera,

et tu te mueras en plante carnivore, pour mieux blesser ceux, qui t'approcheront.

Si je ne te sauve pas, je n'aurai plus la force de vider,

comme un pesticide, ma bile, pour t'offrir la paix.

Je m'arrêterai tout près de toi,

et sous le sol sec,

nos racines se toucheront, s'enlaceront, se pénètreront,

on se sucera la sève jusqu'à ce qu'on en crève...

 

*

 

Génération.

 

Petite pierre ronde,

tu tombes dans l'onde,

tu brises la belle nappe de cristal,

et tu glisses lentement dans ton lit.

Tu jettes un sourire à ton papa qui lit,

dans son fauteuil le journal.

Dans tes rêves tu fondes,

la confrérie des petites filles blondes.

Petites filles blondes, dressées comme des arbustes,

sur les bords du ruisseau,

laissant les feuilles d'or glissées dans leurs cheveux,

croquant des pommes âpres,

et qui jouent avec les os de leurs papas trop vieux.

Entre vos jambes gambadent,

de petites souris,

et vous poussez des cris, mes petites chéries.

Courrez à l'ambassade,

acheter des armées,

félines et déchainées,

qui reviennent déchirer,

vos papas effrayés,

et c'est un fleuve de sang,

qui coulera longtemps.

Elles hurlent dans le vent :

peuple de parents,

nous sommes les enfants.

 

*

 

Rois haletants.

 

Déchirure du voile,

de la chaire du soleil nocturne.

Eclat éblouissant,

lacère insolent,

pénètre troublant,

et file, nous aveuglants.

Vers un papillion de feu blanc,

de fleur de lune, en fleur de lune,

file, embraser la terre.

Chaque lampée dévêtue, répand,

ses os d'ailes, de pollen.

Chaque reptation de son magma, annèle,

les prairies fleuries de la nuit.

Ses ailes trompent son corps,

se troublent et s'étendent.

Dragon papillion flamboyant éjaculant,

ses ailes pourpres, sur nos enfants et nos parents.

Les tisons de ses griffes tracent,

d'amples voiles écarlates dans nos coeurs.

Génocide intrinsèque épuisé.

Il se pose entre mes yeux,

une armada de papillions,

qui étendent leurs ailes,

comme d'effrayants anges embrasés,

voilant le ciel.

Le jour c'est levé,

sur une humanité oubliée.

 

*

 

Rahloirts.

 

La guerre universelle achevée,

la déchirure blanche envahit la vie nocturne,

affleure et traverse l'abandon.

L'hydre livide écrase et pompe mes reliques,

son vaste abdomen annelé se double et se démultiplie.

Le papillon rouge a butiné.

 

 

 

 

Morne 1993-96